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Danseuses/danseurs de ballet : facteurs de risque et exposition aux blessures

// RÉÉDUCATION

En plus des conséquences à court terme, les blessures répétitives prédisposent les danseurs à des douleurs à long terme.

Mise en ligne le 13 Sep 2024
Mise à jour le 15 Jan 2025
Épidémiologie Danse
Blandine

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Article rédigé par Blandine MAUDHUIZON

Le ballet est une forme de danse traditionnelle et très technique qui a vu le jour en Italie avant d'être exportée en France et en Russie où elle a prospéré pendant la Renaissance. La discipline allie savoir-faire athlétique et art pour susciter l'émotion chez son public.

Le ballet est un exercice artistique qui nécessite un entraînement à long terme et qui exige des performances physiques élevées. La plupart des danseurs de ballet sont exposés à un entraînement intense dès leur plus jeune âge, avant que leur système musculo-squelettique ne mûrisse. Cette charge de travail peut exposer les athlètes aux blessures, comme le démontrent ces chiffres rapportés par les compagnies de danse professionnelles, indiquant qu’entre 67 et 95 % de leurs danseurs sont blessés chaque année (2). En effet, les entraînements comprennent des mouvements très exigeants, puisque les danseurs effectuent généralement plus de 200 sauts au cours d'un cours, dont la majorité sont atterris unilatéralement, exposant leurs membres inférieurs à des forces de réaction au sol pouvant atteindre neuf fois leur poids corporel.

Une étude rétrospective a révélé que 21,6 % des blessures chez les adolescents danseurs de ballet d'élite se produisaient au niveau de la hanche (déchirures labrales, tendinopathies de fléchisseurs de hanche, dysfonctionnement de l’articulation sacro-iliaque…) (2). L’étude de Singh et al. montre d’ailleurs que les danseurs de ballet présentent des taux plus élevés de lésions chondro-labrales et de maladies dégénératives de la hanche que la population générale (2). D’après leurs observations, les lésions intra-articulaires sont plus fréquemment retrouvées dans la région postéro-supérieure. Ces changements dégénératifs sont plus susceptibles de se produire à travers une amplitude de mouvement supra-physiologique.

La majeure partie des blessures sont de nature non traumatique avec de nombreux facteurs étiologiques proposés, notamment des exigences supra-physiologiques, des amplitudes de mouvement extrêmes, une technique inappropriée, une biomécanique spécifique à la danse, un manque de force et de conditionnement. En plus des conséquences à court terme, les blessures répétitives prédisposent les danseurs à des douleurs à long terme, à une diminution de la qualité de vie et à une augmentation des taux d'arthrose de la hanche.

Les entorses de la cheville sont les principales blessures musculo-squelettiques chez les danseurs de ballet professionnels et non professionnels. La mobilité de cheville des danseurs de ballet est d’une grande importance pour atteindre des flexions plantaires et rotations externes extrêmes. La limitation de l'amplitude de mouvement de la cheville peut provoquer une pronation du pied, et par la suite entraîner une perte du soutien médial de la voûte plantaire du pied. Si la stabilité fournie par le milieu du pied est diminuée, le centre de gravité est modifié, et le danseur peut être perturbé jusqu’à chuter, ce qui peut être le résultat d'une blessure aiguë.

En conséquence, les exigences physiques intenses de la danse exposent les pieds des danseurs à un risque élevé de blessures, aussi bien aiguës que chroniques. Les différences structurelles entre les danseurs peuvent modifier la cinétique et la cinématique des membres inférieurs.

Le sexe peut affecter le risque de blessure si l’on considère le temps passé sur pointe des danseuses par rapport aux danseurs, soumettant leur corps à des contraintes spécifiques avec le maintien prolongé de flexion plantaire complète de la cheville (comme illustré avec le schéma ci-dessous). Par conséquent, les danseuses de ballet subissent une incidence plus élevée de blessures au pied et à la cheville. La construction de base des pointes est renforcée avec une plateforme, une tige rigide pour soutenir la voûte plantaire, et entourée d'une housse en tissu. Cela peut exercer un stress biomécanique accru sur les membres inférieurs. Toutefois, bien que le chaussage au ballet soit une considération importante, leur rôle est rarement abordé dans la littérature actuelle (3).

Schéma adapté par Neuroxtrain de la revue systématique de Li et al.

 

Parmi les mouvements effectués lors des entraînements et des performances, les positions de pointe, la demi-pointe et en dehors peuvent provoquer une surcharge articulaire, ainsi que des microtraumatismes ligamentaires et musculaires, notamment au niveau de la cheville et du genou, augmentant ainsi le risque de blessure (1).

Environ 15 à 20 % de la population a un os supplémentaire à l'arrière de la cheville, appelé l’os trigone. Les danseurs avec cet os supplémentaire peuvent souffrir de conflits à l'arrière de la cheville, notamment en relevé ou en pointe.

Les différentes positions des pointes en ballet varient selon la position des pieds et réduisent la base d'appui, ce qui nécessite un effort musculaire et neurophysiologique important. Ajouté à ces positions, l'impact des mauvaises réceptions avec chutes après sauts et pirouettes est lié à de nombreuses blessures ligamentaires et musculo-squelettiques, notamment au niveau des membres inférieurs. Par exemple, ces sauts répétés peuvent provoquer des fractures de stress, notamment au tibia, os sésamoïde ou aux métatarsiens.

Par ailleurs, la pression exercée par la flexion, le saut et l'exécution du plié peut provoquer un syndrome douloureux fémoro-patellaire. Cela peut affecter le cartilage derrière la patella, entraînant une douleur sourde et douloureuse.

En général, les danseurs ont un taux de blessures au ligament croisé antérieur (LCA) beaucoup plus faible que les autres athlètes. L’exposition intense aux sauts et pivots dès le plus jeune âge contribue à améliorer le contrôle musculaire, ce qui peut expliquer cette différence (4).

Par ailleurs, des éléments extrinsèques ont été observés comme facteurs de risque de blessure : les erreurs d'entraînement, les méthodes d'entraînement inappropriées, les exigences techniques et le style de danse, le chaussage, la température ambiante, les sols, ainsi que les facteurs psychosociaux.

En plus de l'entraînement intensif, de nombreux danseurs disposent de peu de temps pour récupérer entre les séances et n'ont pas d'« intersaison ». Non seulement danser cinq heures par jour ou plus entraîne un risque accru de fractures de stress et d’autres blessures comme expliqué précédemment, les régimes alimentaires restrictifs peuvent également contribuer aux blessures liées à la danse. Une bonne alimentation est importante pour les danseurs de tous âges. Dans la mesure où les corps sveltes et la pression d'être mince sont présents dans le ballet, des troubles de l'alimentation risquent d’apparaître. Les danseurs qui ne consomment pas suffisamment de calories et de nutriments courent un risque plus élevé de blessureset de problèmes de santé mentale. Les signes indiquant qu'une danseuse ne reçoit pas une alimentation adéquate incluent des menstruations retardées, de la fatigue et une perte de poids.

En tant que forme d’art, la danse classique requiert une grande forme physique alliant force, flexibilité et endurance. Costa et al. ont observé une incidence de blessures pouvant atteindre plus de 95 % au cours de la vie d'un danseur (4). Il est donc crucial de se concentrer sur la prévention des blessures. Effectivement, les données actuelles de littérature suggèrent fortement l’inclusion de programmes d’exercices pour prévenir les blessures, y compris des exercices visant à améliorer la force musculaire des membres inférieurs ainsi que des muscles du dos, qui sont les régions les plus fréquemment touchées. Un programme de prévention devrait donc inclure une approche globale tout en tenant compte des exigences uniques de la danse et des pathologies qui en résultent.

Tout le contenu de cet article est présenté à titre informatif. Il ne remplace en aucun cas l’avis ou la visite d’un professionnel de santé.

À lire également : 

Sources :

  1. Li, F., Adrien, N., & He, Y. (2022). Biomechanical Risks Associated with Foot and Ankle Injuries in Ballet Dancers: A Systematic Review. International journal of environmental research and public health, 19(8), 4916. Article sous Common Creative Licence (CC BY 4.0)

  2. Singh, Y., Pettit, M., El-Hakeem, O., Elwood, R., Norrish, A., Audenaert, E., & Khanduja, V. (2022). Understanding hip pathology in ballet dancers. Knee surgery, sports traumatology, arthroscopy : official journal of the ESSKA,. Article sous Common Creative Licence (CC BY 4.0)

  3. Huang PY, Lin CW, Jankaew A, Lin CF. Relationship of Extrinsic Risk Factors to Lower Extremity Injury in Collegiate Ballet Dancers. Front Bioeng Biotechnol. 2022.  Article sous Common Creative Licence (CC BY 4.0)

  4. Costa, M. S., Ferreira, A. S., Orsini, M., Silva, E. B., & Felicio, L. R. (2016). Characteristics and prevalence of musculoskeletal injury in professional and non-professional ballet dancers. Brazilian journal of physical therapy, 20(2), 166–175. Article sous Common Creative Licence (CC BY 4.0)

MAUDHUIZON Blandine (Rédactrice NeuroXtrain)

Kinésithérapeute en cabinet libéral à Paris, après avoir exercé un an à Nantes, notamment au sein ducentre de formation de Nantes Basket Hermine. A combiné sa volonté d'aider les autres avec sa passion pour le sport, allant du pilates au tennis, en passant par la course à pied.

Réalisation de diverses formations :

  • Kinésithérapie en pré-post partum – IPPP (2023)

  • Prévention et traitement des blessures en course à pieds (1.0 - 1.2) - La Clinique du Coureur (2022-2023)

  • Pilates et kinésithérapie - Physioacadémie (2022)

  • Rééducation pelvi-périnéale - Santé Formapro (2021)

  • Pathologies de la cheville: de la prise en charge à la reprise d'activité - Santé Formapro (2021)

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