Logo NeuroXtrain

Analyse du saut vertical : outils pratiques pour évaluer la performance et les risques

// RÉÉDUCATION

Le saut vertical est un mouvement fondamental dans de nombreuses disciplines sportives comme le basketball, le volleyball, le football ou encore l’athlétisme.

Mise en ligne le 11 Mar 2025
Mise à jour le 11 Mar 2025
Prévention
Thibaut

Thibaut

Introduction

 

Le saut vertical est un mouvement fondamental dans de nombreuses disciplines sportives comme le basketball, le volleyball, le football ou encore l’athlétisme. Il est souvent utilisé comme indicateur de puissance musculaire des membres inférieurs et est fréquemment analysé en biomécanique et en rééducation. En kinésithérapie et en sciences du sport, l’étude du saut vertical permet d’évaluer la performance des athlètes, d’identifier les asymétries musculaires et biomécaniques ou encore de détecter les déficits fonctionnels post-blessure, notamment après une reconstruction du ligament croisé antérieur (LCA).

 

L’analyse du saut vertical s’effectue à l’aide de diverses mesures, telles que la hauteur du saut, la force appliquée au sol, la vitesse de décollage et la puissance développée. Ces paramètres sont essentiels pour comprendre l’efficacité du mouvement et optimiser l’entraînement des sportifs. De plus, la fiabilité des tests de saut, notamment le saut avec contre-mouvement (CMJ en anglais pour countermovement jump), est un sujet d’intérêt majeur pour les chercheurs et les cliniciens du sport.

 

 

Dans ce nouvel article, nous aborderons dans un premier temps les différentes étapes du saut vertical, en mettant en lumière les contributions spécifiques de la hanche, du genou et de la cheville. Enfin, nous examinerons l’importance du saut vertical dans la prévention des blessures et l’identification des déficits fonctionnels les plus pertinents, afin de mettre en lumière des facteurs de risques de blessures ou des indicateurs de la performance sportive.

 

Quel outil pour analyser un saut vertical ?

 

Un saut vertical peut être analysé avec différents outils et technologies permettant d’évaluer la performance athlétique et le profil biomécanique du sujet. Parmi les méthodes les plus courantes, on retrouve les plateformes de force, les capteurs inertiels, les systèmes de capture de mouvement et les applications mobiles. Il est important de préciser que plusieurs types de sauts sont reportés dans la littérature à 2 et à 1 jambe tel que le drop jump (DJ), le single (SLL) ou le double leg landing (DLL), le countermovement jump (CMJ) ou encore la batterie de « hop » test notamment retrouvé comme indicateurs pour le retour au sport après une chirurgie du ligament croisé antérieur.

 

Les plateformes de force sont considérées comme la référence en laboratoire. Elles mesurent les forces exercées sur le sol et permettent de calculer des paramètres comme la hauteur du saut, la puissance développée et la vitesse d’extension. Ces indicateurs sont souvent analysés pour le retour au sport ou en performance sportive. On peut les retrouver en cabinet et le plus souvent dans les clubs de sport de haut niveau

 

Les capteurs inertiels, comme les accéléromètres et gyroscopes intégrés aux ceintures ou chaussures connectées, offrent une alternative portable et pratique. Ils enregistrent les accélérations et rotations pour estimer la hauteur du saut et le temps de vol. Ils permettent également de vérifier la bonne exécution du mouvement.

 

Les systèmes de capture de mouvement, utilisant des caméras haute vitesse et des marqueurs réfléchissants, permettent une analyse cinématique détaillée en mesurant précisément les angles articulaires et les trajectoires du centre de masse. Ces systèmes sont réservés le plus souvent aux laboratoires car la plupart du temps long à mettre en place et à analyser en plus de leur prix souvent élevé.

Enfin, certaines applications mobiles comme « MyJump » exploitent la vidéo au ralenti pour estimer la hauteur du saut en analysant le temps de suspension. Elles peuvent également estimer les valeurs de puissance et de force. Elles restent des alternatives peu onéreuses et ont été validées comme fiable.

 

Le choix de l’outil dépend le plus souvent du niveau de précision recherché et du contexte d’utilisation.

 

Les étapes du saut vertical

 

Le saut vertical peut être divisé en plusieurs phases distinctes, chacune impliquant des contributions spécifiques des articulations de la hanche, du genou et de la cheville.

Analyse des courbes de force, vitesse (« velocity ») et de puissance (« power »), d’un saut vertical en contre-mouvement (Crédits image : Souza et al, 2020)

 

Dans les prochaines sections, nous allons vous détailler les différentes étapes, en prenant comme exemple le plus connu, l’analyse du saut en contre-mouvement :

 

 

1 - Phase d’initiation et d’armement (Étape B)

  

La phase d’initiation correspond au moment où l’athlète se prépare à sauter. Elle implique une flexion des hanches, des genoux et des chevilles pour générer un potentiel élastique et maximiser la force propulsive. L’extension des bras peut également être utilisée pour augmenter l’inertie du saut. Dans le test de saut en contre-mouvement, il est indiqué de garder les mains sur les hanches pour garder une reproductibilité dans le test, cependant, un saut vertical dans les conditions sportives peut effectivement être assisté par les mains, en gardant les mêmes composantes que lors du test de saut.

 

Les études montrent que l’activation musculaire, en fin de phase d’armement, est essentielle pour préparer une poussée efficace. Vous le retrouvez sur le schéma (en introduction de cette section), avec une légère augmentation de la courbe de la force.

 

2 - Phase de contre-mouvement (Étape C)

  

Cette phase correspond à la descente du centre de gravité avant l’impulsion. Elle permet d’accumuler de l’énergie élastique dans les muscles et les tendons, favorisant une contraction musculaire plus explosive lors de la propulsion. La force et la puissance maximale atteinte pendant cette phase est un bon indicateur de la performance du saut. Elle est caractérisée par une courbe ascendante sur le graphique, correspondant à cette « énergie élastique », avec une composante excentrique très importante.

 

3 - Phase de propulsion (Étape D)

  

Lors de cette phase, l’athlète applique une force maximale contre le sol pour se propulser vers le haut. Les contributions relatives des articulations sont spécifiques au type de saut réalisé. En effet, Kotsifaki et ses collaborateurs en 2021 nous indiquent que lors d’un saut vertical, la hanche, le genou et la cheville contribuent presque équitablement à la production de force, avec environ 31 % pour la hanche, 34 % pour le genou et 35 % pour la cheville. En revanche, lors d’un saut horizontal, les auteurs nous informent que la hanche et la cheville jouent un rôle plus important que le genou (voir l’image ci-après).

 

 

L’implication des articulations de la hanche, du genou et de la cheville dans la phase de propulsion pour un saut horizontal et vertical (Crédits image : Kotsifaki et al, 2020) 

 

4 - Phase de vol (Étape E)

  

Une fois en l’air, le corps ne peut plus produire d’accélération active. La hauteur du saut dépend de la vitesse initiale de décollage et de la force appliquée au sol. L’alignement du corps et la position des bras influencent également la stabilité du saut. Une composante importante à analyser lors de cette étape peut être la hauteur de saut et le temps de vol.

 

 

5 - Phase d’atterrissage

  

L’atterrissage est une phase critique du saut, car elle implique une dissipation rapide de l’énergie cinétique. Une absorption efficace des forces d’impact est essentielle pour prévenir les blessures. Kotsifaki et ses collaborateurs, dans leur même étude, montrent qu’il existe une répartition assez identique pour un saut vertical comparativement à la phase de propulsion (c’est-à-dire une identique équilibrée entre les 3 articulations du membre inférieur).

 

Cependant, lorsque l’on parle de saut horizontal, on constate que le genou est la principale articulation responsable de l’absorption des forces d’atterrissage (65 %), suivi par la hanche (24 %) et la cheville (11 %). On en déduit donc l’intérêt des « hop » tests dans les critères de reprise après une chirurgie du ligament croisé antérieur. En effet, on comprend l’implication très importante du genou à l’atterrissage et l’analyse des réceptions en « stiff landing » (arrêt « dur » avec peu d’absorption du genou) ou en « soft landing » (absorption complète du genou à l’atterrissage).

 

Toutefois, ces tests sont énormément remis en question sur leur critère principal d’analyse de longueur de saut afin de déterminer la « performance » intrinsèque du genou opéré en comparaison au côté sain. Effectivement, le genou au final n’est pas le facteur principal de la propulsion du saut et, de ce fait n’est que peu responsable de la longueur du saut mesuré. Par contre, et comme expliqué juste au-dessus, l’analyse de l’atterrissage au sens biomécanique, afin de vérifier un bon contrôle moteur, reste une démarche de réflexion à intégrer en plus que de la longueur de saut.

 

Un atterrissage asymétrique ou mal contrôlé peut augmenter le risque de blessures ou de récidive, notamment pour une rééducation du LCA, mais nous y reviendrons dans la section suivante.

 

 

L’implication des articulations de la hanche, du genou et de la cheville dans la phase de propulsion pour un saut horizontal et vertical (Crédits image : Kotsifaki et al, 2020)

 

 

Prévention des blessures et identification des déficits

 

L’évaluation du saut vertical est un outil précieux pour identifier les déficits fonctionnels et prévenir les blessures, et notamment celles du membre inférieur. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte dans la prévention des blessures et l’amélioration de la performance.

 

Détection des asymétries

  

Les asymétries musculaires et les différences de force entre les deux membres inférieurs sont des indicateurs de risque de blessure. Après une reconstruction du LCA par exemple, les patients présentent souvent une diminution de la force et de la puissance sur le membre opéré. L’analyse du saut vertical permet de quantifier ces déficits et d’adapter la rééducation en conséquence.

 

La réflexion la plus pertinente pour combler un déficit de force est de mettre en place des planifications adaptées à chaque individu. Il peut s’agir de combler des asymétries de force entre les 2 membres inférieurs par un renforcement musculaire analytique ou alors un déficit global de force ou de puissance par rapports aux données pré-blessure avec des exercices polyarticulaires comme le squat, les fentes ou du soulevé de terre.

 

Importance de l’entraînement pliométrique

  

L’entraînement pliométrique, qui implique des exercices de sauts répétés, est un moyen efficace d’améliorer la puissance musculaire et la capacité d’absorption des forces d’impact. Il est souvent intégré dans les protocoles de prévention des blessures pour renforcer les membres inférieurs et optimiser la mécanique du saut.

 

L’entraînement pliométrique possède lui-même sa propre progression car il existe différent niveau de pliométrie avec la pliométrie basse et la pliométrie haute, avec des spécificités propres à chacune d’entre elles.

 

Optimisation du contrôle neuromusculaire

  

Une mauvaise coordination neuromusculaire pendant l’atterrissage peut entraîner une instabilité articulaire et augmenter le risque de blessure.

 

Comme nous l’avons vu dans la section précédente, la répartition des contraintes sur un saut est importante à analyser car des répartitions trop déséquilibrées peuvent être un indicateur important d’un manque de contrôle moteur. Des exercices de renforcement et de stabilisation ciblés peuvent améliorer le contrôle moteur et réduire la charge excessive sur les articulations. Du travail de focus externe ou de feed-back visuels sont des interventions de choix pour améliorer ces lacunes de contrôle moteur.

 

Influence des facteurs biomécaniques et environnementaux

  

Le type de surface, le port de chaussures adaptées et la fatigue musculaire sont autant de paramètres qui influencent la biomécanique du saut et peuvent modifier le risque de blessure. Adapter l’environnement d’entraînement permet de réduire les contraintes excessives sur les articulations.

 

Vigilance cependant à analyser les sauts dans des conditions se rapprochant de la pratique réelle sur des surfaces stables.

 

 

 

Conclusion

 

Le saut vertical est un indicateur clé de la performance des membres inférieurs et un outil essentiel en kinésithérapie et en sciences du sport. L’analyse détaillée des différentes phases du saut permet d’optimiser l’entraînement des athlètes et d’identifier les déficits fonctionnels après une blessure. En intégrant des stratégies de prévention et une évaluation précise des paramètres biomécaniques, il est possible de réduire le risque de blessure et d’améliorer la récupération post-opératoire, notamment après une reconstruction du LCA.

 

Tout le contenu de cet article est présenté à titre informatif, il ne remplace en aucun cas l’avis ou la visite d’un professionnel de santé

Sources

Fu, H., Li, Z., Zhou, X., Wang, J., Chen, Z., Sun, G., Sun, J., Zeng, H., Wan, L., Hu, Y., Wang, F., & Zheng, J. (2023). The profiles of single leg countermovement jump kinetics and sprinting in female soccer athletes. Heliyon, 9(8), e19159 – Article sous License Creative Commons CC-BY-ND 4.0

 

Kotsifaki, A., Korakakis, V., Graham-Smith, P., Sideris, V., & Whiteley, R. (2021). Vertical and Horizontal Hop Performance : Contributions of the Hip, Knee, and Ankle. Sports Health A Multidisciplinary Approach, 13(2), 128‑135

Labban, W., Manaseer, T., Golberg, E., Sommerfeldt, M., Nathanail, S., Dennett, L., Westover, L., & Beaupre, L. (2024). Jumping into recovery : A systematic review and meta‐analysis of discriminatory and responsive force plate parameters in individuals following anterior cruciate ligament reconstruction during countermovement and drop jumps. Journal Of Experimental Orthopaedics, 11(2)– Article sous License Creative Commons BY 4.0

 

Souza, A. A., Bottaro, M., Rocha, V. A., Lage, V., Tufano, J. J., & Vieira, A. (2020). Reliability and Test-Retest Agreement of Mechanical Variables Obtained During Countermovement Jump. International Journal Of Exercise Science, 13(4). https://doi.org/10.70252/xqxf8049